lundi 30 avril 2007

le shiraz sous pression, ça me casse les bulles!

Nous étions chez Nick, informaticien oenophile, qui fait partie du même groupe de dégustation que moi. À tour de rôle, les membres organisent une dégustation, à raison d'environ une dégustation par année. Tout ça se passe à Londres, où je vis, et j'ai mis 1 heures et quart (métro, train et marche) à arriver chez Nick. Rien d'original ici, à Londres, vu les distances, c'est rare qu'on se déplace juste pour un café. Le thème de la dégustation ce soir-là est le Champagne. Vous admettrez que le jeu en vaut la chandelle et les vingt kilomètres qui nous séparent Nick et moi (je viens de faire la recherche sur Internet, je n'en reviens pas! Rien que 20 kilomètres en 1 heure et quart!). Peu importe, nous dégusterons et boirons des vins légers, plein de bulles et dont certains ont une acidité à vous donner des frissons! Je m'aperçois, alors qu'on débute la soirée par un verre de Cava et que la liste des vins à déguster me tombe sous les yeux, que j'aurai affaire à un mélange de mousseux du Nouveau Monde et à des champagnes. Pas de problèmes, des mousseux du Nouveau Monde, y'en a de délicieux. Et c'est exactement ce que confirment mes yeux qui arrivent sur le dernier vin de la liste, le E & E Sparkling Shiraz 1999, sensé être l'une des meilleurs shiraz mousseux produits en Australie. Arrive le moment de déguster le Shiraz, qui je vous le rappelle, est le dernier vin dégusté. Le groupe est animé, c'est un peu bruyant et les notes commencent à se faire rares. Pas meilleure que les autres, je commence à divaguer doucement aussi. Le Shiraz me rappelle à l'attention. Comme à toutes les fois que j'ai dégusté des shiraz mousseux, je suis déroutée: y'a ce fruit intense et concentré qui a subi le grand traitement de la méthode champenoise! Cette méthode est sensée apporter des notes légères de brioches et de pain grillé à des vins amaigris qui manquent de charactère. Alors pourquoi? Pourquoi faire subir à un vin issu d'un cépage produisant des vins amples, charnus, au profil aromatique bien typé un pareil traitement? Bien que le vin soit loin d'être mauvais, je me dis tout simplement que c'est une perte de temps. J'aurais acheté un vin tranquille tout simplement. Pour le meilleur vin de la soirée, voir le Champagne listé sous les meilleurs vins bus dernièrement.

samedi 28 avril 2007

Silex

Il y a deux semaines, j'ai eu le bonheur de déguster l'un des meilleurs vins produits par Didier Daguenau, dont le domaine se trouve à Pouilly-Fumé. Il s'agit de Silex 2003, vin culte dont la réputation n'est plus à faire. C'est toujours avec humilité que j'approche le moment de déguster l'un des grands vins de ce monde: saurais-je repérer les éléments qui en font un si grand vin? Bien sûr, je trépide aussi d'impatience, bien que les deux vins précédant l'arrivée de Silex, le Domaine du Salvard Cheverny 2005 et le Sancerre la Croix au Garde 2004, Domaine Henri Pellé, ont bien servi d'entrée en matière: tous deux à base de Sauvignon blanc, le premier, vif, frais et fruité, avec une larme de Chardonnay pour lui donner plus de corps, et le second, pur sauvignon, avec une acidité telle qu'elle rend le vin anguleux, des notes d'herbe et d'asperge, propres au sauvignon, beaucoup de minéralité et de pierre à fusil, reflétant son origine. C'est heureusement ou malheureusement grâce à ces vins que le repérage des éléments sera plus facile à faire. En tant que dégustateur, je cherche les signes, les points de repères que je connais bien. Ma mémoire vient d'être rafraîchie avec les deux premiers vins. Arrive enfin Silex, le troisième vin de la soirée fait à partir de sauvignon blanc. Je plonge mon nez dans le verre : c'est totalement original, ça me fait rire de bonheur, ça sent la pierre à fusil (Silex) à plein nez, et puis c'est frais, tellement minéral qu'on est transporté près d'un ruisseau, dans un sous-bois, tout entouré de fraîcheur. Je goûte : ce n'est plus du sauvignon, le vin est bien au-delà d'une simple définition de cépage ou de lieu. Ce vin est vivant (le domaine est biodynamique), plein, rond et heureux. Il est aussi racé, mais surtout, tellement original. Loin d’une recette toute prête utilisée pour atteindre un certain style, le vin a son identité propre et vraie. En le goûtant, on suit son histoire, les images nous apparaissent comme les scènes d’un film et la réalité de l’expérience fait jaillir les émotions. Quand on va au cinéma, peu importe le film, on paie toujours le même prix. J'aimerais bien que les prix des grands et petits vins soient semblables. On m’a toujours dit que j’étais rêveuse…

mercredi 18 avril 2007

Sakés et télé

Me voilà à 'the Hide' en train de siroter une eau minérale. J'ai marché, comme il se doit dans une grande ville, et maintenant, j'ai soif. Non seulement ça, je suis en avance, vrai miracle! En avance pour une dégustation de Saké qui a lieu à mon ancienne école, le 'Wine and Spirit Education Trust'. Le bar se remplit de japonais enthousiastes, le sourire aux lèvres en anticipation de la soirée où leur boisson nationale sera mise à l'honneur. Sans prétendre aimer le Saké (qui m'a souvent rendue malade, mais à qui la faute, au Saké ou à moi?), je me suis inscrite par curiosité, pour en apprendre sur un alcool que je connais peu. Approchent les 19 heures, je monte les marches pour arriver dans une salle pleine de japonais, plusieurs d'entre eux en kimono marine agrémenté de motifs blancs. Je vois des caméras et des caméramans à gauche et à droite, et tout à coup, j'ai l'impression que je vais assister à quelque chose d'important. Je me choisi une bonne place, dans la première rangée, tout juste à la droite de la table du présentateur. Ils se sont presque tous exprimés en japonais, avec la traduction assurée par la jeune et talentueuse sommelière du restaurant Zuma. Arrive enfin le moment le plus attendu de la soirée, la dégustation. Neuf Sakés à déguster, tous accompagnés d'une petite quantité d'eau de la distillerie, qui a servi à faire le Saké. On nous informe que c'est une pratique populaire au Japon que de servir non seulement le saké mais aussi l'eau qui entre dans la confection. C'est par souci pour la santé, l'abus de substance oblige. Je verse le premier Saké dans mon verre. Contrairement à tous les Sakés transparents, sans couleur, bus jusqu'à maintenant, ce Saké a une robe dorée assez profonde, ma curiosité est piquée à vif. Je plonge mon nez dans le verre : surprenant! Surprise mais aussi émue, comme lorsqu'on rencontre une personne intègre, bonne et singulière pour la première fois. Ça sent le fromage à plein nez, tellement que je me dis que si j'avais dégusté à l'aveugle (je veux vraiment dire avec un bandeau sur les yeux) sans avoir aucune idée de l'objet de la dégustation, j'aurais choisi pour objet le fromage! Revenue de mon émotion, je trouve aussi des notes de miel (ce Saké est doux), de soufre et des notes oxidées. Sa souplesse en bouche est remarquable. C'est inattendu, totalement différent et délicieux. (C'est le premier Saké de la liste à droite) Nous dégustons les huit autres Sakés tant bien que mal, pendant que tous les producteurs, tour à tour, nous présentent leur Saké (dur de se concentrer sur les sensations et d'essayer de comprendre les explications). C'est terminé, je suis ravie, tous les Sakés ont fait preuve d'originalité. Je suis sur le point de partir quand on braque une caméra sur moi. Voulez-vous répondre à quelques questions pour la télévision japonaise? Stimulée par les Sakés, me voilà qui répond...oui. Je crains bien que mon entrevue ne subisse beaucoup de coupures au montage, mais tant pis, le plus beau c'est d'avoir tout à apprendre quand sa curiosité a été piquée!

mardi 10 avril 2007

Früli in Frühling

Je ne me souviens pas du nom du pub branché du 'fish and chips', mais je sais bien comment y retourner. Pas pour le poisson, ni pour leurs plats cuisinés, mais parce qu'on y sert de la Früli aux fraises. Moi qui ne suis pas amatrice de bière, je peux dire que la Früli est tombée dans le mille avec moi. Nous avons dégusté cette bière belge, mon chum et moi, par pure chance et hasard, il y a quelques mois. Le choc fut tel que le lendemain, je me suis mise à téléphoner de tout bord, tout côté pour trouver où je pourrais me procurer cette bière crémeuse qui, même si elle est fruitée, n'est pas trop douce. Mauvaise nouvelle, personne au Royaume-Uni ne l'importe en bouteille, seulement en tonneaux pour la servir pression dans les pubs. Cette bière est non seulement satisfaisante, elle est aussi paisible et excitante à la fois: d'un côté il y a l'onctuosité et le bon équilibre entre l'amer et le doux, et de l'autre, la nouveauté des saveurs de fraises. Je vous le dis, la Früli aux fraises, voici la raison pour pour visiter le pub plus souvent! ps. Frühling = printemps

lundi 9 avril 2007

Good fish, bad fish

Hier, c'était le dimanche de Pâques, soleil magnifique et des fleurs de toutes les couleurs plein Regents Park. Mon chum et moi conversons profondément quand tout à coup, on se rend compte qu'on a faim. On s'invite au restaurant. On marche sans but précis et on passe devant un pub restauré au goût du jour, belles couleurs, clientèle cool, alléchant: on entre. Après plusieurs années dans cette grande capitale, on sait par expérience que la bouffe de pub, y'a de quoi se méfier. Mais les temps changent et les pubs se renouvellent en gastropubs aux menus plus soignés et aux prix plus élevés! On a peut-être une chance de s'en tirer. Assis à une petite table ronde sur des chaises de salon recouvertes de velours à rayures mauve et rose très trendy, on attend nos traditionnels 'fish and chips' en sirotant un verre de vin (sans commentaire) et une bière, et on évalue nos chances de manger une assiette potable, tout en parlant d'autre chose. Vaut mieux rester silencieux sur le sujet pour pas casser le party. Deux blondes au fond de teint presqu'invisible à la table à côté se font servir leur lunch. L'une a commandé un autre classique du pub: 'toad in the hole' ou saucisses et pommes de terre pilées (pommes purées si jamais un français arrive à ma page) servis dans une barquette carrée faite de Yorkshire pudding. On se retient pour pas pouffer: trois grosses saucisses trônent sur une montagne de purée déposée royalement dans une énorme boîte de pâte cuite carrée. L'ensemble est grotesque et monstrueux, mais qui sait, ce sera peut-être bon... C'est notre tour, voici notre poisson qui flotte sur une mer de frites, accompagné d'un ilôt de salade au nord de l'assiette. Agréable surprise, les frites sont préparées avec de vraies pommes de terre et sont bien meilleures que les bâtonnets farineux invariablement servis tout partout sur la planète. Les feuilles de laitues sont fraîches et croquantes et la vinaigrette légère et savoureuse. Tout va bien. Couteaux en main, on s'attaque à la pièce de résistance, le poisson, qui semble vêtu d'un scaphandre tellement le chef a été généreux avec l'appareil à frire. On plonge. Les frites rendent l'harponnage difficile, mais on parvient à nos fins. Il y a bien autant d'appareil que de poisson. La chair est tendre, mais le malheur, c'est que ça ne goûte rien! L'appareil n'a absolument aucun assaisonnement, même pas de sel, et le poisson non plus, n'ont rien mis dessus. C'est plate et long, un grand filet de poisson avec un lourd manteau de friture, sans goût. Comme on était pas le premier avril, on s'est pas laissé prendre. Non mon poisson, tu casseras pas le party. Le nom du pub? Je ne m'en rappelle pas...

dimanche 8 avril 2007

gare aux goûts

La gare: l'endroit où on arrive après un court, un long trajet, où le voyage commence ou finit, un immeuble immuable pourtant rempli de mouvements, d’allées et venues de passagers qui retournent ou quittent leur chez eux pour peu ou pour long temps.

Je ne veux pas parler de n’importe quelle gare, non. Il s’agit de la gare des papilles gustatives et du goût, des sensations sucrées et amères que nous procurent ce que l’on mange et boit et de tous les arômes complexes et multiples dont les meilleurs préparations nous comblent. Parler de, décrire et commenter ce moment précis où un certain vin vient nous chercher un WOW!, où un plat mijoté se révèle un peu plus à chaque bouchée, où ce vin, avec ce plat, atteint une symbiose inattendue ou planifiée.

Y'aura des découvertes et des émotions du passé, mais surtout des voyages à venir, en terres inconnues, au no woman’s land d’une fille qui trouve son bonheur à prendre le temps de déguster. Et c’est dans ce sens aussi que ‘gare’ s’inscrit : ‘gare’ comme dans « Gare à la marche! » qu’un autre passager pourrait vous crier aux pieds des escaliers. ‘Gare’ pour ‘faites attention’ à ce que vous mangez et dégustez. Comme pour toute chose qui en vaut la peine, il faut s’arrêter pour déguster, prendre son temps pour se former une idée sur ce qu’on vient d’avaler.

En voiture les créatures! C’est sans peur et sans reproche que je m’engage à vous raconter les aventures, heureuses et malheureuses, de mon palais et de mon nez.