Vendredis du vin 10, le vin au visuel
Iris, de son vignoble du Languedoc, nous convoque à choisir un vin avec nos yeux pour cette 10e édition des Vendredi du vin. C'est l'étiquette qui doit guider notre choix, que ce soit par son originalité, son humour ou sa beauté, c'est elle qui mène le bal. Difficile de se fixer vu le foisonnement d'étiquettes de toutes sortes ces dernières années, vu l'embarras du choix.
J'avais d'abord pensé vous parler d'un vin dont l'étiquette joue sur l'humour et le jeu de mot. La voici :
Il s'agit du 2004 Marilyn Merlot, Napa Valley. Voici la dernière étiquette de ce vin qui en est à son 20e millésime. Pour voir des étiquettes des millésimes précédents, cliquez ici. Il semble un peu léger ce vin, mais il est bien nommé, jeu de mot mis à part, car le Merlot est connu pour son apport charnu à l'assemblage bordelais, et parce que sa réputation, dans l'ensemble, manque de sérieux, c'est le parent pauvre des cépages nobles, le sot de la famille, qui, bien que charnu, n'a pas de substance. En fait, ce Merlot américain est un vin sérieux, si on en juge par son prix, £21.00 (29.99 EUR) chez le caviste londonien Philglas & Swigott. Et c'est justement à cause de son prix, trop élevé pour mon maigre budget d'après Noël, (et peut-être aussi à cause d'un certain préjugé contre les Merlots du Nouveau Monde et contre le Merlot vin de cépage) que je me concentrerai sur un autre vin américain.
J'ai déjà parlé cet été d'un des vins de Randall Graham, du domaine Bonny Doon. Vous verrez en cliquant ici que l'étiquette du Pacific Rim Riesling dont j'avais fait la revue est loin d'être banale: une nymphe sortant d'une coquille, et on voit, en regardant la nymphe, les contre-étiquettes, des découpes d'éléments classiques de la cuisine asiatique tels que l'anis étoilé, le gingembre, la citronnelle et le piment. Une étiquette on ne peut plus efficace, qui attire les curieux et les renseigne illico sur le meilleur accord culinaire possible.
Pour ce VdV, j'ai choisi une autre bouteille de Bonny Doon. Cette étiquette est plus artistique mais tout aussi surprenante et originale. On y voit une prison éclairée par la lumière puissante d'une des tours de surveillance. Le lien? Big House veut dire prison en slang américain. Le Big House Red 2004, Ca' del Solo, Californie est un assemblage de Carignan, Petite Sirah, Sangiovese, Zinfandel, Barbera, Syrah, Malbec, Montepulciano, Grenache, Tannat, Touriga nacional et de 5 % d'autres cépages. C'est pour dire que les prisons sont pleines! Sans conteste, on fait face à un assemblage tout aussi unique et original que l'est l'étiquette, en tout point le reflet de Randall Graham, propriétaire du domaine. Randall, en quête du 'Great American Pinot Noir' en 1979, s'est aperçu que les cépages du Rhône étaient plus prometteurs que le Pinot Noir sur le sol californien. Depuis, on le surnomme le 'Rhône Ranger' (autre jeu de mot, get it?), mais il se surnomme lui-même 'Rhône Deranger' ce qui ne surprend pas quand on songe que la découverte est au coeur de l'évolution de ce domaine. Prenez le temps d'admirer les étiquettes de Bonny Doon que plusieurs artistes ont réalisé (entrez dans le 'Dooniverse' et cliquez sur 'Learn our ways', ça se trouve au bas).
Avec un vin pareil, on ne sait pas à quoi s'attendre. La seule chose que nous apprend l'assemblage, c'est que la majorité des cépages sont du sud et que le vin aura probablement le profil méridional. Y'a le nom, Big House Red, qui nous donne des indices: je n'aurai pas affaire à un poids plume dont les caractéristiques principales seront la finesse et l'élégance. Allons-y donc pour voir. D'un rubis assez profond, le vin est dominé par des arômes de petits fruits rouges foncés, d'herbes, de mine de plomb et d'un peu d'eucalyptus. En bouche, on est d'abord frappé par une forte acidité, suivi par un beau fruit rouge bien juteux et des notes boisées bien intégrées. C'est un vin puissant mais pas lourd, plein de vie, de charme, très facile à boire donc vraiment Nouveau Monde, mais sa fraîcheur et sa minéralité lui garantissent une place à table.
Faut dire que c'est l'étiquette du Carignane 2004 Vieilles Vignes de Bonny Doon qui m'a poussée à faire la revue de ce vin. On y voit un petit américain avec son bâton de baseball qui regarde son modèle, l'Europe, soit des joueurs de foot, tous adultes avec du poil aux jambes. J'aime ce type de dessins dont le sujet n'a pas un lien immédiat avec le vin. Les deux dessins sont de Chuck House, un créateur réputé d'étiquettes et auteur de Icon, un livre portant sur les étiquettes.
Et bien, Iris, tu m'auras bien inspirée avec ton thème. Et vous, si vous aviez à créer une étiquette, qu'est que vous dessineriez?
2 commentaires:
Super choix - les vins de Randall Grahm. Il donne l'impression d'avoir l'esprit d'une artiste et alors choisit toujours de l'art original pour ses étiquettes. Dommage qu'il a vendu la marque "Big House" et "Cardinal Zin" en juillet 2006. :(
François deLigneris (anciennement de Chateau Soutard à Saint-Emilion) me rappelle toujours de Randall Grahm.
Je vais me lancer dans les étiquettes !
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